Mehdi Benhabri, candidat Modem - Le Centre pour la France aux législatives a rencontré, à sa demande, la section locale de la Ligue des droits de l'Homme pour évoquer les thèmes abordés
dans la circonscription. L'occasion pour le candidat de développer sa vision de sa "France rassemblée" et pour la Ligue des droits de l'Homme
d'aborder le sujet notamment de la vidéosurveillance et de la répartition territoriale inégale des logements
sociaux.
Concernant la position des candidats, et notamment celle de M. Benhabri, sur le droit de vote des étrangers non communautaires aux élections locales, cliquez ici.
-----
A l'occasion des législatives, la Ligue des droits de l'Homme appelle au débat d'idées
La démocratie, ça se construit : des propositions à débattre, enrichir, valider…
Un quinquennat s’achève. Nous entrons dans une nouvelle phase politique, avec la tenue des élections législatives, destinées à renouveler la représentation nationale à l’Assemblée et le profil
des forces qui vont proposer, discuter, voter les lois.
Qu’elle quelle soit, la nouvelle chambre devra affronter d’immenses défis. Sur fond d’hégémonie financière globalisée, les urgences sociales, écologiques, économiques risquent de s’exacerber ;
les tensions consécutives aux inégalités, aux discriminations, aux graines de xénophobie semées précédemment également.
Défigurée, la République doit retrouver le sens profond de sa devise remettre sur le marbre les outils de l’égalité, de la fraternité, de la fraternité.
Cela implique une série de choix et de mesures pour oxygéner la démocratie, rendre effectives la participation des citoyens aux décisions, la représentation politique, les relations entre cette
représentation et la société dans son ensemble.
Cela ne va pas de soi. Les débats d’idées, les affrontements, les résistances et les défaitismes de tous ordres vont, n’en doutons pas, se manifester pour maintenir autant que possible
d’insupportables statu quo.
Il en va donc de la responsabilité de chacun de faire vivre largement le débat démocratique. Forte de la conviction que la démocratie, ça se construit, la Ligue des droits de l’Homme soutient une
série de propositions immédiates pour la démocratie politique, la démocratie sociale, les droits et les libertés.
Ces propositions sont inscrites dans le cadre du pacte pour les droits et la citoyenneté, signé par plus de cinquante associations et organisations syndicales. Elles sont à débattre et à
enrichir. La Ligue des droits de l’Homme appelle développer des débats, avec des militants associatifs et syndicaux, élus et experts autour de leur pertinence et leur mise en œuvre.
Pour l’accueil des étrangers dans la dignité et le respect des droits
Les conditions d’accueil et d’existence des étrangers de France sont indignes. Le constat est accablant : celles et ceux qui vivent ici, aiment ici, travaillent ici, payent ici leurs impôts,
leurs cotisations et leurs charges ne sont pas considérés et traités sur une base d’égalité des droits
Parce que la France demeure l’une des premières destinations des demandeurs d’asile au sein des pays industrialisés, depuis 2003 les successives réformes législatives ont privilégié des
procédures accélérées pour l’examen de leur dossier et l’octroi de la protection subsidiaire au détriment d’une pleine application de la convention de Genève.
Les réformes du Ceseda (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et demandeurs d’asile) de 2003, 2006, 2007 et 2011 ont chaque fois réduit un peu plus les perspectives d’obtention d’un titre
de séjour pour des étrangers résidant et travaillant dans notre pays, depuis de longues années parfois. Ce faisant, ces étrangers sont livrés sans défense lorsqu’ils ont un emploi à la
surexploitation de leurs employeurs, et aux trafics des marchands de sommeil, puisqu’ils ne peuvent bénéficier de l’attribution d’un logement social.
Les conditions très restrictives d’octroi des visas entraînent des drames familiaux et personnels en empêchant la réunion des familles et poussent souvent les migrants à prendre de grands risques
pour pouvoir quand même venir dans notre pays.
L’enfermement des étrangers, en zone d’attente à l’entrée du territoire (touristes, demandeurs d’asile, mineurs isolés…) et en centres de rétention (familles avec enfants, malades…) est devenu la
règle.
Dans la majorité des pays européens, les résidents étrangers votent aux élections locales. Ainsi le vote est-il en accord avec les réalités vivantes du pays. Aujourd’hui, l’exercice de la
démocratie doit s’élargir et le droit de vote ne peut plus être strictement conditionné à la nationalité.
Neuf propositions pour l’accueil des étrangers dans la dignité et le respect des droits :
- Des conditions d’accueil et des procédures équitables pour que chaque demandeur d’asile puisse défendre sa situation et l’autorisation de travailler pour subvenir à ses propres besoins ;
- La suppression de la liste OFPRA des pays d’origine sûrs, puisqu’elle sert de filtre aux demandes d’asile, et l’abolition du règlement Dublin II ;
- Le caractère suspensif du recours sur toute décision de l’OFPRA ;
- La régularisation de tous les sans-papiers, par la réforme du Ceseda, avec l’attribution de plein droit de la carte de résident de dix ans ;
-La suppression des visas de court séjour et la justification explicite et écrite par les services consulaires de tout refus de visa ;
-La fin de la politique d’enfermement, la fermeture des centres de rétention et la garantie de procédures suspensives, respectueuses des droits des demandeurs et de leur défense, notamment
par l’existence de permanences d’avocats dans les zones d’attente ;
-Le rétablissement de procédures contentieuses en faveur des droits de la défense par l’abrogation des dispositions contraires votées depuis 2003 ;
- La ratification par la France de la Convention des Nations unies sur les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille ;
- L’instauration immédiate du droit de vote de tous les résidents étrangers aux élections locales.
Pour l’avenir des enfants et des jeunes
Pour la première fois depuis longtemps, « les jeunes », qui ne constituent pas plus une catégorie homogène que les « vieux », connaissent une entrée dans la vie d’adulte plus difficile que celle
de leurs parents. Pourtant, leur parole est peu prise en compte ; à peine sont-ils entendus lorsqu’ils se mobilisent. Le plus souvent, ils sont érigés en « classe dangereuse ».
Près de trois millions d’enfants vivent dans des familles en dessous du seuil de pauvreté et près d’un quart des 18-25 ans connaissent des situations de grande précarité, qu’ils soient étudiants,
apprentis ou chômeurs. Pour beaucoup d’entre eux, la survie quotidienne, l’accès à l’éducation, aux soins, au logement, à la culture, relève d’un véritable parcours du combattant, indigne d’un
pays comme le nôtre.
En matière d’éducation et de formation, il est inacceptable que le poids des origines sociales détermine la réussite scolaire. Ces inégalités ne sont pas le fruit d’un quelconque déterminisme,
comme certains sont prêts à l’avancer, mais le fruit d’une politique qui a délibérément mis à mal le service public d’éducation.
L’égalité d’accès de chaque jeune, quelles que soient son appartenance de genre, ses origines sociales ou géographiques, à une formation et une qualification, reste à construire. Or les enquêtes
sur l’emploi montrent que la détention d’un diplôme est la meilleure protection contre le chômage et que les cent cinquante mille jeunes qui sortent du système éducatif sans diplôme ni
qualification connaissent les plus grandes difficultés pour trouver du travail. Et quand elles et ils en ont, ces nouvelles recrues sont trop souvent les premières à subir les revers de
conjoncture économique et les modifications des normes de l’emploi.
Dans cette situation dégradée qui est celle des jeunes, le gouvernement a fait le choix de la dérive sécuritaire, faisant en sorte que chacune de ses nouvelles lois concerne les mineurs d’une
façon ou d’une autre, en alignant toujours davantage le droit des mineurs sur le droit des majeurs, jusqu’à frôler sa disparition, pendant que le travail de tous les acteurs de la prévention de
la délinquance est systématiquement dénigré.
Six propositions pour l’avenir des enfants et des jeunes :
- Rendre effectif le droit à l’éducation, par l’accueil de tous les jeunes en âge d’être scolarisés. Programmation accélérée de mesures spécifiques pour les jeunes en situation de handicap, pour
les enfants roms, pour les mineurs isolés
- Rétablissement et renforcement des dispositifs d’aide aux élèves en difficulté au sein du service public d’éducation et à tous les niveaux de la scolarité
- Assurer la formation et la qualification la plus élevée possible pour qu’aucun jeune ne sorte du système scolaire sans qualification
- Favoriser le premier emploi pour mettre un terme à la kyrielle de petits boulots, stages et CDD qui constituent le lot de premières années des jeunes après leur sortie de formation
- Sortir les familles de la précarité et assurer une aide financière conséquente aux jeunes en formation
- Rétablir l’esprit de l’ordonnance de 1945 sur la justice des mineurs, considérer l’enfermement comme l’ultime recours et équilibrer prévention et répression
Pour mettre fin à l’arbitraire et libérer la justice
Les conditions d’utilisation de la police et du fonctionnement de la justice sont inquiétantes dans notre pays. Le constat est largement partagé : jamais les rapports n’ont été aussi dégradés
entre la police et les populations, entre la justice et les justiciables. Cette situation est en grande partie causée par des conceptions malsaines et inefficaces de l’ordre public, ainsi que par
une absence de moyens destinés aux forces de sécurité.
Ainsi les contrôles d’identité sont souvent l’occasion de comportements discriminatoires de la part des forces de police, et soumettent les personnes à l’arbitraire. La population, singulièrement
dans les « quartiers » désignés par le pouvoir politique comme autant de « zones à risques » poussant à un déploiement de violence d’Etat en dehors de toute proportion, a aujourd’hui peur de la
police.
Le risque est alors grand de « bavures » policières, qui font rarement l’objet d’une poursuite par citation directe du parquet, à la différence des autres infractions, générant d’un côté un
sentiment d’impunité et, de l’autre, un sentiment d’injustice.
Or les récentes affaires politico-financières ont démontré jusqu’à la nausée que le parquet avait d’étroites relations de dépendance avec l’exécutif. Le résultat en est visible sur la justice des
mineurs. Le répressif, sans nier qu’il en faille, l’emporte sur l’éducatif avec une préférence pour les centres fermés pour mineurs.
Dans une inflation législative sécuritaire les lois préfèrent la sécurité à la garantie des libertés individuelles, telles celles sur la récidive, les étrangers ou sur la rétention de sûreté.
Sans oublier que les régimes d’exception créés par les lois anti-terroristes renforcent une dérive inégalitaire.
Enfin, conséquence logique, le bilan carcéral est accablant. En 2011, le coefficient d’occupation moyen des prisons est de 122 %, la construction de nouvelles prisons fonctionnant comme un appel
à l’augmentation du nombre de détenus.
Huit propositions pour mettre fin à l’arbitraire et libérer la justice :
- La systématisation d’une remise d’attestation de contrôle d’identité, pour rendre « visible » tout comportement de harcèlement policier.
- Le rétablissement d’une police de proximité, dans un esprit de service public, de respect des populations et d’authentiques missions de sécurité.
- L’établissement de procédures strictes et contrôlées d’engagement de la force publique pour qu’elle soit légitime.
- La suppression du lien entre le pouvoir et le parquet, et l’assurance de l’exercice plein et entier de l’indépendance de la magistrature.
- Le retour à la justice des enfants, issue de l’esprit de l’ordonnance de 1945, pour revenir à un droit pénal des mineurs privilégiant l’éducatif au répressif
- La fin de la surproduction législative sécuritaire par l’abrogation des lois sur la récidive, la rétention de sûreté et le droit des étrangers.
- La suppression de tous les régimes judiciaires d’exception parce que nous sommes attachés au principe d’une justice égale pour tous.
- La priorité aux peines alternatives préparant à une réelle réinsertion ; l’enfermement doit rester l’exception pour mettre fin à la surpopulation carcérale.
Pour un système de santé mêlant proximité, prévention et efficacité
Les fondements de la Sécurité sociale sont de plus en plus remis en cause au profit d’une logique de gestion comptable. La situation du système de santé en général se dégrade, et les hôpitaux en
particulier sont les premiers concernés. L’égalité d’accès aux soins n’est plus assurée pour tous.
Notre système de santé est l’objet d’attaques incessantes qui visent à réserver une part de plus en plus importante de son fonctionnement au secteur privé. Les déserts médicaux, la fermeture des
établissements de proximité, les franchises médicales sont autant de méthodes qui accroissent les inégalités sans oublier le malaise des professionnels, confrontés à des enjeux dont la résolution
est toujours plus complexe, tels le handicap et la dépendance. Le renoncement aux soins est en corrélation avec la carence de professionnels sur certains territoires et pour certaines
spécialités, et accentue ainsi les inégalités sociales.
Une mention spécifique doit être faite aux soins pour les étrangers sans titre de séjour. Les modifications de l’Aide médicale d’Etat (AME), comme les dispositions prises sur le séjour pour
soins, sont en résonance avec les discours xénophobes de la loi sur l’immigration, alors même qu’elles n’ont aucun effet positif sur les finances publiques.
Enfin, dans le domaine de la psychiatrie, la loi portant sur les soins sans consentement déporte le système vers toujours plus de mesures sécuritaires, au détriment de la prise en charge des
patients atteints de troubles mentaux, et la politique de secteur se vide de sens.
Dix propositions pour un système de santé mêlant proximité, prévention et efficacité :
- La sauvegarde du service public hospitalier seul à même de garantir l’égalité des droits pour tous grâce à des financements supplémentaires et rénovés des établissements de santé, et à une
révision de la loi HPST
- Le maintien et le développement d’établissements de proximité, ouverts sur la ville, premiers interlocuteurs des usagers et répondant aux spécificités territoriales
- Le retour au fondement de la solidarité nationale, où chacun participe selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.
- L’abrogation des franchises médicales qui ont aggravé la situation des plus démunis et singulièrement celle des patients atteints de maladies chroniques
- Le recrutement de professionnels médicaux et paramédicaux et une politique offensive de formation continue indispensables à l’égalité d’accès et à la qualité des soins
- Une politique de santé mentale respectueuse des personnes, et le contrôle du juge des libertés et de la détention sur les soins sans consentement
- Le rétablissement, sans participation financière initiale, de l’AME, aide médicale aux étrangers
- La prise en compte du handicap et de la dépendance dont la compensation doit procéder de la solidarité nationale.
- Le retour aux dispositions antérieures à la loi de juin 2011 sur l’immigration concernant la délivrance d’une carte de séjour pour soins en faveur des étrangers malades
- La prise en compte d’un droit effectif à l’information des patients ou des résidents dans les établissements sanitaires ou sociaux
Pour rendre effectif le droit au logement pour tous
Expulsions locatives… Augmentation constante des loyers et des charges… Le marché immobilier privé spécule et c’est le logement social qui trinque ! Et pourtant elles et ils sont peut-être sans
logis ou mal logés, mais elles et ils ne sont pas sans droits !
Se loger est pour chacun une nécessité vitale. Aujourd’hui ce sont des retraités aux faibles pensions, des travailleurs pauvres et singulièrement les femmes seules avec enfant(s) à temps partiel
imposé qui sont concernés. En cause, l’Etat qui n’impose pas la construction de logements sociaux accessibles aux plus modestes, mais accélère avec la loi Boutin de 2009 les expulsions pour
impayés et rend légale avec la loi dite Loppsi 2, l’expulsion sans jugement des occupants des abris « non autorisés ». La grande majorité des logements, en location ou en propriété restent
inaccessibles à la plus grande partie de la population.
Il faut en même temps traiter l’urgence et la pérennité. 3 Millions de mal logés, 250 000 personnes à la rue. Des personnes enfermées dans les quartiers lointains, mal desservis, mal pourvus en
commerces et en services. Ou bien obligées d’aller d’urgence en urgence, sous la menace permanente d’une expulsion. L’Etat doit enfin faire respecter la loi SRU avec au moins 20% de logements
sociaux dans toutes les communes, et parallèlement assumer ses responsabilités vis à vis des personnes qui sont sans solution d’hébergement malgré la loi DALO.
Un service public du logement Le logement n’est pas une marchandise, mais un bien d’intérêt général. Des dispositions législatives et réglementaires sont nécessaires pour l’affirmer. L’Etat doit
retrouver comme orientation majeure l’allocation massive de moyens et inciter des constructions dans un urbanisme respectueux de l’environnement. Il faut la volonté politique de redonner de la
force au développement humain et social au lieu de se contenter de regarder se développer des territoires d’exil.
Cinq propositions pour rendre effectif le droit au logement pour tous :
- refuser les expulsions sans relogement dans des conditions décentes ;
- réorienter massivement les aides en direction du secteur locatif social et donner la priorité à la production de logements accessibles aux revenus les plus modestes ;
- revaloriser fortement les aides personnalisées au logement et sécuriser les conditions de financement public, du logement social ;
- renforcer les procédures de concertation des habitants en amont des projets de rénovation ou reconstruction ;
- privilégier un développement des territoires qui favorise le lien social et la protection de l’environnement et promouvoir un habitat équilibré entre les nécessités urbaines et la diversité de
l’espace public au moyen d’une politique foncière publique forte.
Pour aller plus loin : www.pactecitoyen.org