Présentation des actions de la LDH dans le sud du département des Hauts-de-Seine
Les obsèques d'Hamida Ben Sadia se dérouleront mardi 3 novembre à 11h au cimetière de Malakoff
Puis un hommage lui sera rendu à 13h à la Mairie de Malakoff
Message de Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue des droits de l'Homme :
Hamida est morte ce jeudi 29 octobre du cancer qu'on lui avait découvert il y a quelques mois.
Nous savions bien que cette issue était hélas probable, mais nous espérions quand même, et en tout cas nous ne l'imaginions pas si prochaine. Je revois Hamida si heureuse d'avoir pu revenir siéger le mois dernier au Comité central, je repense au courage hors du commun dont elle a fait preuve toute sa vie face à tant d'épreuves et parfois de drames. Elle portait magnifiquement nos valeurs et nos espoirs, malgré tout, sans jamais confondre la passion militante qui l'habitait avec la moindre parcelle de haine. Et je n'ai pas besoin de rappeler quelle amie elle pouvait être, nous l'avions tous appris jour après jour.
Le sentiment qu'une mort est injuste est toujours un peu absurde, mais je l'ai rarement éprouvé aussi fortement. Je vous en prie, si vous ne l'avez pas encore fait, lisez "Itinéraire d'une femme française", pour rester encore un peu avec elle et mesurer encore mieux ce que nous perdons. C'était une femme debout, qui nous faisait honneur, c'était quelqu'un de bien. Je la pleure.
Jean-Pierre Dubois.
-----------------------------
Hamida Ben Sadia était venue le 13 mars, à Malakoff pour présenter son livre "Itinéraire d'une femme française" et débattre sur le droit des femmes, avec son extraordinaire
ferveur, la qualité de sa présence au monde étincelante. Son énergie, son humour, sa gentillesse, sa simplicité nous avaient conquis. Elle nous avait informés de sa maladie en juin dernier.
Nous attendions son rétablissement pour poursuivre et prolonger les échanges avec elle. Le dialogue est aujourd'hui interrompu...
De la vie bordée de terribles épreuves et de souffrances qu'elle a traversée, elle nous a rendu l'exemple de la générosité, l'amour de la justice, et l'obligation de se battre.Nous
poursuivrons notre combat en sa mémoire, d'autant plus déterminés. Notre tristesse est infinie.
Nous publions ci-après l'article que nous lui avions consacré dans le numéro 3 de notre bulletin d'avril 2009 :
Le 13 mars dernier, Hamida Ben Sadia, féministe et militante des droits de
l’Homme, était présente à Malakoff : à la librairie La cabane à livres pour une séance de dédicaces et à la Maison de la vie associative pour un débat. L’occasion pour Hamida Ben Sadia
d’expliquer son engagement, qui s’est formé et forgé à Malakoff.
A partir de son expérience et de son histoire personnelle («Itiniéraire d’une femme française» chez Bourin Editeur), Hamida Ben Sadia a insisté sur le rôle essentiel de l’éducation et sur
l’actualité du combat féministe.
L’éducation est un élément fondamental dans la construction d’un individu. Mais «favoriser l’intégration, ce n’est pas se couper de sa langue maternelle. Pourquoi le fait d’être bilingue serait
un atout quand il s’agit de langues européennes et considéré comme un handicap quand il s’agit de langue africaine ?». Pour Hamida Ben Sadia, «l’éducation et le savoir l’ont empêché de sombrer
dans la violence ou l’intégrisme religieux».
Hamida Ben Sadia est aujourd’hui engagée dans le combat pour le droit des femmes (et notamment l’aménagement du droit international privé avec la mise en place d’une convention entre états pour
protéger les femmes) au sein de la Ligue des droits de l’Homme. «L’élément le plus détestable aujourd’hui dans la différence entre l’homme et la femme c’est la violence domestique, dont une femme
sur 7 souffre actuellement en France. Le combat des femmes doit s’envisager dans sa globalité, il ne faut pas segmenter les luttes. Ainsi, le parcours des fi lles issues de l’immigration doit
rentrer dans le combat général du droit des femmes. Nous devons revisiter la lutte des femmes et redonner corps à ce combat. Nous avons tous à y gagner, y compris les hommes, à voir les femmes
s’épanouir et s’émanciper».
Pour Hamida Ben Sadia, «être féministe, c’est accepter le choix des femmes». Mais ont-elles toujours le choix ? Dans tous les cas, il convient de sortir du manichéisme. Les solutions ne se
trouvent pas dans les idées toutes faites. La réflexion, les échanges de points de vue sont essentiels pour permettre de recouvrir la dignité. Car «la dignité, c’est trouver les moyens de vivre
libre».
«Le droit, encore le droit, rien que le droit, toujours le droit» telle est la devise d’Hamida Ben Sadia. Tout cela ne s’envisage qu’avec «une plus grande fraternité en apportant solidarité et
humanité à tous ceux qui en ont besoin».
----------------------------
Retrouvez le reportage réalisé par HumaniTV lors de sa venue à Malakoff :
La vidéo est disponible à la page :
http://www.humanitv.fr/modules/x_movie/x_movie_view.php?cid=11&lid=7
Pour la visualiser, il est nécessaire d'avoir "firefox" installé sur votre ordinateur
----------------------------
Retrouvez le témoignage d’Hamida Ben Sadia dans son livre «Itinéraire d’une femme
française». L’expérience, le vécu, les épreuves terribles traversées par Hamida Ben Sadia et sa famille, font de son «itinéraire » un point de repère très fort et convaincant qui peut aider des
jeunes filles en conflit avec leur famille, autant que les familles concernées, pères et mères, fratries, à réfléchir à la question si délicate, douloureuse, du mariage arrangé, dit «mariage
forcé», dont il faut bien saisir les tenants et les aboutissants, pour éviter les stigmatisations hâtives qui risquent d’aggraver encore la discrimination, le racisme, l’incompréhension générale.
Hamida Ben Sadia a pris le recul nécessaire pour s’exprimer avec mesure, pour éviter de grandes souffrances à tous les protagonistes de ces situations souvent tragiques.
Le livre d'Hamida Ben Sadia est disponible à la Cabane à livres, 75 avenue Pierre Laroousse à Malakoff.
Cliquez ici pour lire un extrait du livre
----------------------------
A lire également :
- l'article publié sur Malakoffiot antilibéral et unitaire
- "Le combat d’une vie pour l’égalité des femmes et contre la dérive paternaliste du féminisme" publié sur OummaTV
----------------------------
Hamida, 1961-2009 : « Si mon obstination à vivre fait peur, c’est que résolument j’ai choisi d’être une combattante, pas une victime.
»
Hamida Ben Sadia est décédée le 29 octobre. Membre du comité central de la LDH depuis 2007 et du bureau national depuis le congrès de juin dernier, elle a succombé des suites d’un cancer
d’une grande brutalité et d’une rapidité effrayante. Elle avait 48 ans…
Malgré l’envie qu’elle en avait, malgré la volonté qu’elle montrait lors des dernières occasions de la rencontrer où c’est encore elle qui nous exhortait à l’action, elle n’a pas mené au bout ce
dernier combat. Mais, de cette femme dont rien ni personne n’avait pu venir à bout, nous retiendrons que seule une bien cruelle maladie a pu le faire. Hamida, la tendre, la flamboyante, la
généreuse, la belle, la fonceuse nous a quitté. Hamida humaine, tellement humaine qu’elle en est morte.
Le vide est immense, et l’effroi pour tout dire gagne. Nous n’avions aucune raison de nous préparer. En quelques mois, nous, militants de la Ligue avons perdu avec Saïd Bouziri et Hamida Ben Sadia deux de nos authentiques combattants, deux de ces personnes dont on se complaît à dire qu’un jour au moins on a partagé les mêmes combats. Qui parmi nous n’a pas vécu un jour le regard noir de rage de Saïd et la colère inextinguible d’Hamida devant une injustice du monde, proche, si proche que ni l’un ni l’autre ne pouvaient imaginer que l’on puisse envisager ne serait-ce qu’un instant de ne pas continuer à combattre ?
Si la plénitude d’une vie se mesure à la douleur que laisse la mort, le souvenir d’Hamida n’est pas prêt de s’éteindre. Il nous reste la mémoire de ce qu’elle était et de ce qu’elle a fait. Et son livre, « Itinéraire d’une femme française », un livre rare, un livre unique, celui que seule une Hamida pouvait écrire.
« Je sais que la vie, le parcours de mon père et de ma mère expliquent pour une bonne part mes engagements. J’ai certainement choisi, à travers mes combats, de leur rendre hommage. Hommage à leur condition. De leur rendre justice. Ils n’étaient pas que des immigrés mais des êtres doués d’intelligence et de conscience. Ils m’ont transmis leur rage de vivre, leur goût de la conquête. Ils m’ont fait cadeau de leur amour, ont maladroitement cherché à me rendre heureuse en me mariant. Leurs conditions de vie, la misère sociale, l’exil ne sont pas étrangers aux raisons qui ont conduit à ce choix.
Alors plus encore qu’hier, pour éviter ces drames et d’autres injustices, je veux me donner les moyens de comprendre. Comprendre le monde qui m’entoure, comprendre pour mieux déconstruire les ressorts de la domination ou, plutôt, des dominations. Chercher la signification des actes, des attitudes, y compris – et surtout – de ceux qui nous semblent à première vue les plus éloignés de nos habitudes. C’est cette démarche qui m’a permis d’affronter l’adversité. Aujourd’hui, j’ai le sentiment que seule ma faculté de penser me protège contre les tourments de la vie. Elle me préserve de la fuite en avant dans laquelle je pourrais, comme d’autres, m’engouffrer pour ne pas voir la réalité en face. […]
J’ai été profondément heureuse d’être élue au comité central de la Ligue des droits de l’Homme, en mars 2007, car, au fond, cela correspond bien à mes besoins de réflexion actuels. « Le droit, que le droit, rien que le droit » est la devise avec laquelle ses militants répondent aux défis du moment, parfois au détriment de leur image dans l’opinion publique mais au bénéfice de la dignité humaine. La lutte continue dans chacun des actes de ma vie. Je ne suis pas infaillible, et je ne crois pas à la chance. Je suis seulement lucide, je sais d’où je viens. Je sais aussi que mon corps ne suit pas toujours mon énergie, parfois il me lâche. La maladie m’a suffisamment visitée pour savoir combien elle nous rend fragiles et dépendants des autres. L’idée de la mort ne m’est pas étrangère, indissociable de la vie, elle ne me fait pas peur »